TITRE II. Les moyens du contrôle sur l’action administrative
Chapitre I. L’administration et son juge
Section 1 Détermination de la compétence juridictionnelle
Sur la difficulté à déterminer la compétence juridictionnelle : conclusions prononcées dans l’affaire Association El Hamidia jugée par le Conseil d’Etat, le 5 février 1954 (Rec. p. 77)
De longs développements ont été consacrés, au semestre d’hiver, à la détermination des frontières du droit administratif.
Nous avons vu le droit administratif concerne les activités des personnes publiques, par opposition aux activités des personnes privées.
Au sein des pouvoirs exercés par les personnes publiques, et en premier lieu par l’État, nous avons distingué l’exécutif, le législatif et le judiciaire.
Au sein du champ de compétence du pouvoir exécutif même, le droit administratif concerne les actes de gestion publique, par opposition aux actes de gestion privée.
Cet enchaînement de trois critères de distinction nous a permis d’appréhender globalement les frontières du droit administratif.
Les principes étant posés, reste la question de leur mise en œuvre. Et comme en toute matière, le détail est plus complexe que la présentation générale.
Certains auteurs (v. Bertrand Seiller, Droit administratif, 3ème édition, Tome 1, pp. 211) systématisent la présentation de la compétence de l’ordre juridictionnel administratif en distinguant séparation des pouvoirs et séparation des autorités.
Présentons les avantages et les inconvénients de cette présentation, que nous retiendrons finalement.
La « séparation des pouvoirs » renvoie à la théorie classique de la division des fonctions de l’État en trois branches, exécutive, législative et judiciaire.
La « séparation des autorités » est l’expression retenue par les juristes français pour distinguer les compétences des ordres juridictionnels administratif et judiciaire.
Fonder une présentation sur la distinction entre séparation des pouvoirs et séparation des autorités a un avantage. Cela permet de présenter la compétence du juge administratif en distinguant les fonctions administratives des fonctions législative et judiciaire d’une part, et des fonctions non administratives de l’exécutif d’autre part.
Cette présentation est celle que nous avons retenue pour identifier l’acte administratif.
La présentation de la séparation des autorités permet ensuite de distinguer ce qui, au sein de l’action de l’administration ainsi définie, relève du juge administratif ou du juge judiciaire.
L’inconvénient de cette présentation provient du fait que la séparation des autorités est une forme de séparation des pouvoirs, telle qu’elle a été interprétée par la tradition française (cf. CC 23 janvier 1987, décision 86-224 DC, Conseil de la concurrence).
Par ailleurs, la séparation des autorités a à voir avec la distinction entre l’exécutif et le judiciaire.
Malgré ces réticences de principe, nous retiendrons la distinction proposée.
La première partie ne sera qu’un rappel.
Il convient cependant à titre liminaire de revenir sur le principe de séparation des autorités.
Loi des 16-24 août 1790, titre 2, article 13
« Les fonctions judiciaires sont distinctes et demeureront toujours séparées des fonctions administratives. Les juges ne pourront, à peine de forfaiture, troubler, de quelque manière que ce soit, les opérations des corps administratifs, ni citer devant eux les administrateurs pour raison de leurs fonctions »
Décret du 16 fructidor an III
« Défenses itératives sont faites aux tribunaux de connaître des actes d’administration, de quelque espèce qu’ils soient, avec peine de droit »
Constitution du 22 frimaire de l’an VIII, article 52.
« Sous la direction des consuls, un Conseil d’État est chargé de rédiger les projets de lois et les règlements d’administration publique, et de résoudre les difficultés qui s’élèvent en matière administrative »
Loi du 24 mai 1872 sur l’organisation du Conseil d’État
Conseil constitutionnel, 23 janvier 1987, Conseil de la concurrence*, décision 86-224 DC.