Nous commençons aujourd’hui un nouveau chapitre du droit administratif, qui va nous faire sortir des références auxquelles nous sommes habitués.
Nous avons en effet essentiellement axé notre cours sur l’exercice de la puissance publique à travers l’identification des personnes publiques et des autorités administratives, au régime de la police. Nous n’avons laissé qu’une place réduite au service public ou au contrat.
Le droit de la responsabilité administrative est très spécifique à deux égards.
En premier lieu il constitue un domaine extrêmement important du droit administratif français alors que dans de nombreux systèmes juridiques la responsabilité administrative n’existe pas en tant que telle. En Allemagne par exemple la responsabiliét de l’administration est engagée devant les juridictions judiciaires selon un régime de droit commun. C’est dans ce domaine de la responsabilité que la plus grande spécificité du droit administratif français est perceptible. D’ailleurs, le fameux arrêt Blanco intervient en matière de responsabilité.
En second lieu, le régime de la responsabilité administrative sort, c’est une pétition de principe de le rappeler, du régime de droit commun. le régime de la responsabilité administrative est à certains égards protecteur de l’administration (il assure de manière évidente une indemnisation inférieure à celle qui est servie en droit civil pour les mêmes dommages) il est à bien d’autres égards très protecteur des victimes : engager la responsabilité de l’administration est aisé. Il existe même, et nous y reviendrons rapidement, des régimes de responsabilité sans faute.
Le droit de la responsabilité administrative répond cependant, comme le droit des contrats, à des structures théoriques communes. En particulier, le droit de la responsabilité administrative est structuré autour de trois notions, trois éléments qu’il convient dans tous les cas de réunir et qui doivent constituer pour tout juriste une sorte de routine, une grille d’analyse universelle.
Pour engager la responsabilité de l’administration comme celle d’un particulier, en droit administratif comme en droit civil, trois éléments doivent être réunis : un fait générateur, un lien de causalité, un préjudice.
Mais le fait générateur ne peut être appréhendé sans que ne soit prise en compte la particularité de la matière : le fait générateur qui peut résider dans une faute ou un acte non fautif, doit pouvoir être imputé à l’administration.
C’est la première leçon que nous aurons et durant laquelle nous apprendrons à distinguer, lorqu’un doute peut exister, la faute personnelle d’un agent et ce que l’on appelle la faute de service (DA II Leçon n° 9 : « Faute personnelle et faute de service »).
Le fait générateur, une fois qu’on le sait rattaché à l’action administrative, peut découler d’une faute : c’est la responsabilité pour faute (DA II Leçon n° 10). La responsabilité de l’administration peut également être engagée sans faute (DA II Leçon n°11 : La responsabilité administrative sans faute).
Nous examinerons en leçon numéro 12 le lien de causalité et le préjudice en leçon numéro 13.
Quelques précisions doivent être apportées à titre liminaire et avant de commencer la leçon numéro 9.
En premier lieu, il convient de noter que nous traiterons ici en principe de ce que le droit civil appelle la responsabilité délictuelle et quasi-délictuelle et non de la responsabilité contractuelle.
En second lieu, il convient de noter que la plupart des réflexions que nous aurons ci-dessous, notamment concernant l’identification du fait générateur administratif, concerne les faits fautifs. Pour le dire autrement, certains comportements commis par des agents publics peuvent poser la question de leur rattachement à l’action administrative ou à la sphère privée. La question ne se pose que rarement lorsque le fait générateur tient en un acte administratif qui, lui, sera toujours en principe rattaché à l’action administratif par sa nature même (nous examinerons plus tard l’exception désormais rare de la voie de fait).
En troisième lieu enfin, notons que si c’est le comportement des agents publics ou les conséquences des actes administratifs qui sont pris en compte, c’est toujours la personne morale de droit public à laquelle les agents sont rattachés dont la responsabilité sera engagée. Il en découle, sur le plan patrimonial, que c’est le patrimoine de cette personne morale qui sera engagé.