Article 26 C 1946
« Article 26. – Les traités diplomatiques régulièrement ratifiés et publiés ont force de loi dans le cas même où ils seraient contraires à des lois françaises, sans qu’il soit besoin pour en assurer l’application d’autres dispositions législatives que celles qui auraient été nécessaires pour assurer leur ratification ».
Article 55 C
« Article 55. – Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie ».
B./ Les rapports du Traité avec les autres normes
1) Rapports des traités internationaux entre eux
CE, Assemblée, 23 décembre 2011, Eduardo José K, n°303678
« Considérant que, lorsque le juge administratif est saisi d’un recours dirigé contre un acte portant publication d’un traité ou d’un accord international, il ne lui appartient pas de se prononcer sur la validité de ce traité ou de cet accord au regard d’autres engagements internationaux souscrits par la France ; qu’en revanche, sous réserve des cas où serait en cause l’ordre juridique intégré que constitue l’Union européenne, peut être utilement invoqué, à l’appui de conclusions dirigées contre une décision administrative qui fait application des stipulations inconditionnelles d’un traité ou d’un accord international, un moyen tiré de l’incompatibilité des stipulations, dont il a été fait application par la décision en cause, avec celles d’un autre traité ou accord international ; qu’il incombe dans ce cas au juge administratif, après avoir vérifié que les stipulations de cet autre traité ou accord sont entrées en vigueur dans l’ordre juridique interne et sont invocables devant lui, de définir, conformément aux principes du droit coutumier relatifs à la combinaison entre elles des conventions internationales, les modalités d’application respectives des normes internationales en débat conformément à leurs stipulations, de manière à assurer leur conciliation, en les interprétant, le cas échéant, au regard des règles et principes à valeur constitutionnelle et des principes d’ordre public ; que dans l’hypothèse où, au terme de cet examen, il n’apparaît possible ni d’assurer la conciliation de ces stipulations entre elles, ni de déterminer lesquelles doivent dans le cas d’espèce être écartées, il appartient au juge administratif de faire application de la norme internationale dans le champ de laquelle la décision administrative contestée a entendu se placer et pour l’application de laquelle cette décision a été prise et d’écarter, en conséquence, le moyen tiré de son incompatibilité avec l’autre norme internationale invoquée, sans préjudice des conséquences qui pourraient en être tirées en matière d’engagement de la responsabilité de l’Etat tant dans l’ordre international que dans l’ordre interne ; »
2) Rapports entre la constitution et le droit international
Constitution, article 54
« Si le Conseil constitutionnel, saisi par le Président de la République, par le Premier ministre, par le président de l’une ou l’autre assemblée ou par soixante députés ou soixante sénateurs, a déclaré qu’un engagement international comporte une clause contraire à la Constitution, l’autorisation de ratifier ou d’approuver l’engagement international en cause ne peut intervenir qu’après la révision de la Constitution ».
CE Ass. 30 octobre 1998, Sarran*, p. 369
[SEILLER] REP contre un décret organisant la consultation de la population de Nouvelle-Calédonie prévue à l’article 76 de la Constitution.
La violation par le décret des stipulations du pacte des Nations unies sur les droits civils et politiques et de la Convention européenne des droits de l’homme était alléguée à l’appui du recours. Le CE oppose à ce moyen le fait que la suprématie conférée aux traités sur les lois par l’article 55 C « ne s’applique pas dans l’ordre interne, aux dispositions de nature constitutionnelle ».
3) Rapport entre la loi et le droit international
CE 15 mars 1972, Dame veuve Sadok Ali, p. 213 : Le Conseil d’État fait primer le traité sur la loi antérieure.
Le CE a renvoyé au Minsitre des affaires étrangères l’interprétation de la question de savoir si la Déclaration gouvernementale du 19 mars 1962 entre la France et l’Algérie faisait perdre aux nationaux algériens les droits à pension qu’ils tiraient d’une loi de 1959.
CE Sect. 1er mars 1968, Syndicat général des fabricants de semoules de France, rec. p. 149 : Le Conseil d’État fait primer la loi postérieure sur le Traité.
Le CE considère que se trouver soulevé un problème de constitutionnalité échappant à la compétence de la juridiction administrative.
En l’espèce, un accord douanier maintenait la possibilité d’importer des céréales d’Algérie en maintenant un régime antérieur à l’accession à l’indépendance.
Ce régime est contraire à un règlement communautaire antérieur. Le Conseil d’État applique la loi.
CC, 15 janvier 1975, n° 74-54, Loi relative à l’interruption volontaire de la grossesse
« 1. Considérant que l’article 61 de la Constitution ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d’appréciation et de décision identique à celui du Parlement, mais lui donne seulement compétence pour se prononcer sur la conformité à la Constitution des lois déférées à son examen ;
2. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 55 de la Constitution : « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie. » ;
3. Considérant que, si ces dispositions confèrent aux traités, dans les conditions qu’elles définissent, une autorité supérieure à celle des lois, elles ne prescrivent ni n’impliquent que le respect de ce principe doive être assuré dans le cadre du contrôle de la conformité des lois à la Constitution prévu à l’article de celle-ci ;
4. Considérant, en effet, que les décisions prises en application de l’article 61 de la Constitution revêtent un caractère absolu et définitif, ainsi qu’il résulte de l’article 62 qui fait obstacle à la promulgation et à la mise en application de toute disposition déclarée inconstitutionnelle ; qu’au contraire, la supériorité des traités sur les lois, dont le principe est posé à l’article 55 précité, présente un caractère à la fois relatif et contingent, tenant, d’une part, à ce qu’elle est limitée au champ d’application du traité et, d’autre part, à ce qu’elle est subordonnée à une condition de réciprocité dont la réalisation peut varier selon le comportement du ou des Etats signataires du traité et le moment où doit s’apprécier le respect de cette condition ;
5. Considérant qu’une loi contraire à un traité ne serait pas, pour autant, contraire à la Constitution ;
6. Considérant qu’ainsi le contrôle du respect du principe énoncé à l’article 55 de la Constitution ne saurait s’exercer dans le cadre de l’examen prévu à l’article 61, en raison de la différence de nature de ces deux contrôles ;
7. Considérant que, dans ces conditions, il n’appartient pas au Conseil constitutionnel, lorsqu’il est saisi en application de l’article 61 de la Constitution, d’examiner la conformité d’une loi aux stipulations d’un traité ou d’un accord international ; »
Cass. ch.mixte, 24 mai 1975, Société des cafés Jacques Vabre, D. 1975.497 : la Cour de cassation faut primer le Traité de Rome sur une loi postérieure intervenue en matière douanière. La Cour reconnait en outre la spécificité de l’ordre juridique communautaire, qui crée un ordre juridique « directement applicable aux ressortissants [des Etats membres] et s’impose à leurs juridictions« .
CC 21 octobre 1988, Ass. Nat. Val d’Oise, p. 183 : Le CC juge qu’il lui appartient en qualité de juge électoral de ne pas faire application d’une loi contraire à un traité.
CE Ass. 20 octobre 1989, Nicolo*, p. 190 : Le Conseil d’État est saisi par le Sieur Nicolo, qui conteste le régime d’organisation des élections européennes de 1989 qui ont inclus dans la liste des électeurs les citoyens français des départements et territoires d’outre-mer.
La requête était infondée mais soulevait la question de la motivation : le CE pouvait rejeter la requête en considérant que l’élection était organisée par une loi de 1977, postérieure au Traité de Rome et que sa conventionnalité ne pouvait donc pas être examinée.
Le CE décide pour la première fois d’examiner la compatibimité d’une loi par rapport à une convention internationale postérieure.
CE Ass. 6 juin 1997, Aquarone, p. 206. : La coutume internationale n’est pas supérieure à la loi.
« Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958 : « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie » ; que ni cet article ni aucune autre disposition de valeur constitutionnelle ne prescrit ni n’implique que le juge administratif fasse prévaloir la coutume internationale sur la loi en cas de conflit entre ces deux normes ; qu’ainsi, en écartant comme inopérant le moyen tiré par M. X… de la contrariété entre la loi fiscale française et de telles règles coutumières, la cour administrative d’appel, qui a également relevé que la coutume invoquée n’existait pas, n’a pas commis d’erreur de droit ; »
CE 28 juillet 2000, Paulin, n° 178834
« Considérant, enfin, qu’aux termes de l’article 55 de la Constitution de la République française : « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie » ; que ni cet article ni aucune autre disposition de valeur constitutionnelle ne prescrit ni n’implique que le juge administratif fasse prévaloir la coutume internationale ou même un principe général de droit international sur la loi en cas de conflit entre d’une part, ces normes internationales et d’autre part, la norme législative interne ; qu’ainsi, en écartant comme inopérant le moyen tiré par M. X… de la contrariété qui existerait entre, d’un côté la loi fiscale française et, d’un autre côté, les règles coutumières et les principes de droit international, la cour administrative d’appel de Lyon n’a pas davantage commis d’erreur de droit ; »
C./ L’interprétation des normes internationales
CE Ass. 29 juin 1990, GISTI* p. 171
CE Ass. 3 juillet 1996 KONE*
CE, Assemblée, 23 décembre 2011, Eduardo José K, n°303678
D./ L’effet des normes internationales
CE Ass., 11 avril 2012, GISTI, requête numéro 322326
« Considérant que les stipulations d’un traité ou d’un accord régulièrement introduit dans l’ordre juridique interne conformément à l’article 55 de la Constitution peuvent utilement être invoquées à l’appui d’une demande tendant à ce que soit annulé un acte administratif ou écartée l’application d’une loi ou d’un acte administratif incompatibles avec la norme juridique qu’elles contiennent, dès lors qu’elles créent des droits dont les particuliers peuvent directement se prévaloir ; que, sous réserve des cas où est en cause un traité pour lequel la Cour de justice de l’Union européenne dispose d’une compétence exclusive pour déterminer s’il est d’effet direct, une stipulation doit être reconnue d’effet direct par le juge administratif lorsque, eu égard à l’intention exprimée des parties et à l’économie générale du traité invoqué, ainsi qu’à son contenu et à ses termes, elle n’a pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requiert l’intervention d’aucun acte complémentaire pour produire des effets à l’égard des particuliers ; que l’absence de tels effets ne saurait être déduite de la seule circonstance que la stipulation désigne les Etats parties comme sujets de l’obligation qu’elle définit ; »